Edito N°3 : Danny Boon, Les césars...

Danny Boon, les Césars... et le syndrome des Chti's


Plus de 20 millions d'entrées en salle, plus de 2 millions de DVD et Blu-ray écoulés. Oui, « Bienvenue chez lez Chti's » de Danny Boon est le bien le plus grand succès du cinéma Français de tous les temps.

Nous pourrions tenter longtemps de comprendre les raisons d'un tel carton. C’est vrai, durant plusieurs années, Danny a travaillé et peaufiné son film, qui dormait dans son cœur de chti.

Le casting était parfait, avec un Kad Mérad aussi drôle et attendrissant que notre cher Danny, suivis de toute une ribambelle de personnages hauts en couleur, interprétés avec une grande justesse par des comédiens super motivés. Alors, chef-d'œuvre cinématographique ? Qui sait… Coup de génie marketing ? Sûrement ! Mais c'est bien plus subtil que cela.

Tout d'abord le marketing : le film à été lancé dans le Nord-Pas-de-Calais environ un mois avant sa sortie nationale. Informés depuis longtemps que Danny préparait une comédie sur leur chère région (que je connais bien pour y avoir vécu et travaillé six ans) nos amis les chti's se sont précipités en salle pour le voir en exclusivité dans leur département.

Le bouche-à-oreille fut remarquable d'efficacité, à tel point que dans ces deux départements seulement, le film a été rentabilisé.

Le bouche-à-oreille régional a fait place au bouche-à-oreille national : une comédie pleine de charme venait de conquérir le coeur des plus « braves gens de France » et ce fut le coup d’envoi d’un véritable phénomène de société.

Les qualités cinématographiques du film - indéniables au demeurant -, ayant été abordées au début de mon exposé, passons à ce qui nous intéresse le plus, le Chti et les Césars.

Une seule nomination, une menace de boycott de son réalisateur/acteur principal, une polémique à l'échelon national… « Mais pourquoi tant de haine ? » Vous demanderez-vous. A cela, deux explications. Les Césars ont été créés en grande partie pour défendre les couleurs du cinéma Français, pour prolonger la carrière d'un film et le sauver de la noyade en cas de bide commercial.

Ils sont là aussi pour promouvoir des petits films de qualité, peu coûteux, et inciter les spectateurs à aller les voir.

Alors, face à un film qui a quasiment rattrapé l'indétrônable Titanic, dont toute la presse ne cesse de parler depuis sa sortie il y a un an, les organisateurs de la remise des Césars se sont dits qu'il était peut-être temps de passer à autre chose. Je crois qu'ils ont eu raison.

En revanche, l'idée de créer un César « spécial comédie » est grotesque et inutile. Les comédies seraient, du coup, en marge du palmarès.

Ce serait ainsi la « sanction » d’une réussite hors du commun, typique d’un sadomasochisme à la française qui ne pardonne pas le succès lorsqu’il dépasse les
« normes » admissibles et la joie qu’elle apporte.

Le cinéma Français doit être apprécié dans son ensemble. Vouloir le segmenter ou l'étiqueter serait dévalorisant pour l'œuvre elle-même et placerait les comédies en marge des autres productions nationales. Or, n'oublions pas que la comédie est le genre le plus apprécié des Français et qu'elle engrange la plupart des recettes de film « made in France ».

Avec toute la sagesse qui le caractérise et faisant fi des jalousies, Danny a décidé d’être présent aux Césars. Notre chti aura été plus intelligent que ces « penseurs », en réalité, des poseurs envieux, et c’est tant mieux.

Laurent AMAR
Producteur et Co-Fondateur de http://www.actingcity.tv