Utilisateur anonyme
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4 nov. 2003 à 21:48
Fu Xuen
Messages postés3642Date d'inscriptionjeudi 24 avril 2003StatutContributeurDernière intervention11 septembre 2005
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9 nov. 2003 à 11:07
Bonsoir, je vous propose une petite lecture, et pas de n'importe qui (à mon sens)
Pour l'original
"Les controverses qui se poursuivent sur le partage de fichiers en ligne m'incitent à présenter quelques réflexions sur ce sujet, en tant qu'auteur, et en tant qu'éditeur. Bien sûr, je n'écris et ne publie que des livres, pas des films ou de la musique. Je pense cependant que quelques unes des leçons de mon expérience sont valables aussi pour ces domaines.
Leçon n°1 : L'obscurité est une menace bien plus grave que le piratage pour les auteurs et créateurs
Commençons par l'édition de livres. Plus de 100,000 livres sont publiés chaque année [1], avec plusieurs millions de livres disponibles chez les éditeurs. Cependant, moins de 10000 de ces nouveaux livres atteignent des ventes significatives, et même dans les plus grandes librairies, moins de 100,000 livres disponibles sont en rayon. La plupart des livres ne restent que quelques mois dans les rayons des plus grandes chaînes, et ils attendent ensuite dans les entrepôts... le moment d'être envoyés au pilon. Les auteurs pensent qu'être publiés sera la réalisation de leur rêve, mais pour tant d'entre eux, ce n'est que le début d'une longue désillusion.
Des sites comme Amazon créent un magasin virtuel pour tous les livres disponibles et projettent ainsi un peu de lumière dans l'obscurité des entrepôts. Des livres qui autrement resteraient invisibles peuvent être découverts et achetés. Ceux des auteurs qui ont la chance de récupérer leur droits de la part de leur éditeur les mettent souvent gratuitement en ligne, dans l'espoir de trouver des lecteurs. La Toile a été une aubaine pour les lecteurs, du fait qu'elle rend plus facile de diffuser des recommandations de lecture et d'acheter les livres une fois qu'on en entend parler. Mais malgré cela, peu de livres survivent à leur première ou deux premières années de disponibilité. Videz les entrepôts et vous ne trouverez pas preneur pour beaucoup d'entre eux, même en les donnant. De nombreux livres traînent dans une obscurité méritée, mais bien plus encore souffrent simplement du grand écart entre l'offre et la demande.
Je ne connais pas la taille exacte de tout le catalogue de CD [2], mais j'imagine qu'il doit être de taille similaire. Des dizaines de milliers de musiciens éditent eux-mêmes leurs CD. De rares élus ont un contrat d'enregistrement. Parmi ceux-ci, seuls un nombre encore plus petit voient leur disques atteindre des ventes significatives. Le fond de stock des éditeurs musicaux est inaccessible pour les consommateurs parce qu'ils n'atteint jamais les magasins.
Il y a moins de films, bien sûr, en raison de leur coût de production, mais même dans ce domaine, l'obscurité est un ennemi permanent. Des milliers de réalisateurs indépendants cherchent désespérément des canaux de distribution. Quelques films indépendants comme ceux des cinéastes du mouvement danois du Dogma parviennent aux salles. Mais pour la plupart, leur visibilité est limitée à des projections occasionnelles dans des festivals de cinéma locaux. Le développement de la vidéo numérique offre la promesse de faire de la réalisation de films une activité aussi abordable que la création d'un groupe de rock dans un garage, ou que l'écriture du grand roman américain dans une mansarde.
Leçon 2 : Le piratage, c'est un impôt progressif
Pour tous les créateurs, qui travaillent pour la plupart dans l'obscurité, être assez connu pour être piraté serait le couronnement de leur carrière. Le piratage est une sorte d'impôt progressif, qui peut raboter quelques pour cent des ventes d'artistes connus (et je dis peut car ce point n'est pas prouvé), en échange de bénéfices massifs pour les créateurs bien plus nombreux à qui une visibilité plus grande peut apporter des revenus supplémentaires.
Nos systèmes de distribution pour les livres, la musique et les films sont profondément biaisés en faveur des nantis et en défaveur des démunis. Quelques produits « stars » bénéficient de l'essentiel du budget promotionnel, et sont distribués en grande quantité ; le sort de la majorité dépend, selon l'expression du personnage Blanche Dubois [3] de Tennesse Williams « de la bienveillance d'étrangers ».
La baisse des barrières à l'entrée dans la distribution, et la disponibilité permanente de tout le catalogue au lieu de sa restriction aux ouvrages les plus populaires sont favorables aux artistes, puisqu'elles leur donnent une chance de construire leur propre visibilité et leur propre réputation, en travaillant avec les entrepreneurs du nouveau média, qui seront les éditeurs et les distributeurs de demain.
J'ai observé ma fille de 19 ans et ses amis écouter d'innombrables groupes sur Napster ou Kazaa, et, enthousiastes pour leur musique, aller acheter leurs CD. Ma fille possède maintenant plus de CD que je n'en ai acquis en une vie d'écoute moins exploratoire. Qui plus est, elle m'a fait connaître sa musique favorite, et moi aussi j'ai acheté des CD de ce fait. Et, non, elle ne télécharge pas Britney Spears, mais des groupes [rock] oubliés des années 60, 70, 80 et 90, et leurs équivalents dans d'autres genres musicaux. C'est de la musique qui est difficile à trouver - sauf en ligne - mais qui une fois trouvée conduit à une recherche ciblée de CD, de vinyles, et d'autres artefacts. eBay développe un business actif en la matière, même si la RIAA n'a pas identifié l'opportunité que cela représente.
Leçon 3 : Les consommateurs ne demandent pas mieux que de respecter la légalité, s'ils peuvent
Piratage est un mot lourd de sens, que nous réservions autrefois à la copie/revente en gros de produits illégaux. L'application récente de ce mot par l'industrie musicale et cinématographique au partage de fichiers pair à pair fait obstacle au débat honnête.
Le partage de fichiers en ligne est l'œuvre de passionnés qui échangent leur musique parce qu'il n'y a pas d'alternative licite. Le piratage est une activité commerciale illégitime qui est un problème significatif seulement dans les pays qui n'ont pas de mise en œuvre forte des lois existantes en matière de copyright [4].
Chez O'Reilly, nous publions un grand nombre de nos livres en ligne. Il y a des gens qui en profitent pour redistribuer des copies non payées. (le problème principal, entre parenthèses, n'est pas celui des réseaux de partage de fichiers, mais celui des copies des CD que nous publions qui sont mis en ligne sur des serveurs Web, copiés ou offerts à la vente sur eBay). Ces copies piratées peuvent être désagréables pour nous, mais elles sont loin de détruire notre activité. Nous n'avons observé que peu ou pas du tout de baisse de ventes des livres qui sont aussi offerts en ligne.
Qui plus est, la plupart de ceux qui sont en infraction réagissent à des actions aussi minimes qu'une lettre polie leur demandant de retirer les contenus en cause de leurs serveurs. Les serveurs qui ignorent nos requêtes sont pour la plupart dans des pays où les livres ne sont pas disponibles à la vente, ou sont bien trop chers pour les consommateurs locaux.
Plus intéressant encore, nos activités visant le respect de nos droits sont pilotées par nos clients. Nous recevons des milliers de courriels de clients nous informant de copies et sites illégitimes. Pourquoi ? Parce qu'ils ont de l'estime pour notre entreprise et nos auteurs, et qu'ils veulent que nos activités continuent. Ils savent qu'il y a un moyen légitime de payer pour l'accès en ligne -on peut souscrire à notre service d'abonnement [5] pour seulement 9,95 $ par mois -et par conséquent ils perçoivent les copies gratuites comme illégitimes.
Une autre élément factuel a été souligné par Jon Schull, l'ancien directeur technique de Softlock, la société qui a travaillé avec Stephen King pour son expérience de livre électronique Riding the Bullet. Softlock a utilisé un système de gestion de droits numériques fort, et comptait sur la « superdistribution » pour réduire le coût d'hébergement du contenu, selon l'idée que les clients redistribueraient des copies à leurs amis, qui alors auraient simplement besoin de télécharger une clé pour déverrouiller leur copie. En pratique, la plupart des copies furent cependant téléchargées directement, et très peu furent transmises de client à client. Softlock conduisit une enquête auprès de ses clients pour comprendre pourquoi l'activité de transmission de client à client avait été aussi réduite. Leur réponse, de façon surprenante, fut qu'ils n'avaient pas compris que la redistribution était désirée. Les clients n'ont pas redistribué de copies parce qu'ils « pensaient que ce n'était pas bien ».
La façon la plus simple d'obtenir que les consommateurs arrêtent d'échanger des copies numériques illicites de contenus musicaux ou de films est de leur donner une alternative licite, à un juste prix.
Leçon 4 : le vol a l'étalage est une menace plus grave que le piratage
Alors que peu de ceux qui mettent des livres sur des serveurs Web publiquement accessibles cherchent à tirer profit de cette activité, ceux qui vendent des CD sur eBay contenant des copies de fichiers PDF ou HTML de dizaines de livres pratiquent en fait le piratage -la copie organisée de contenus pour la revente.
Mais même dans ce contexte, nous voyons peu de raisons d'adopter des lois plus restrictives en matière de copyright, ou des systèmes de gestion de droits numériques (DRMS) forts, puisque les lois existantes nous permettent de poursuivre les quelques pirates délibérés.
Il n'y a pas de problème significatif de piratage aux Etats-Unis et en Europe. Le fait que les logiciels de Microsoft aient été accessibles depuis des années sur des sites de téléchargement ou plus récemment sur les réseaux pairs à pair d'échanges de fichiers n'a pas empêché cette société de devenir l'une des plus grandes et plus profitables du monde. Les estimations de « manque à gagner » supposent que les copies illicites auraient été payées ; à l'opposé on ne tient pas compte des copies qui sont vendues comme « mises à jour » à cause de la familiarité qu'ont permis les copies illicites.
Le problème réel est analogue, au plus, à celui du vol à l'étalage, qui représente une perte agaçante pour les activités commerciales.
Au total, en tant qu'éditeur qui distribue également ses livres en version électronique, nous évaluons le problème du piratage comme une taxe sur notre activité plus mineure que celle résultant du vol à l'étalage. Si l'on suit mon observation que l'obscurité est un danger plus grand que le piratage, le vol à l'étalage d'un seul exemplaire peut conduire à une perte de vente d'exemplaires bien plus nombreux. Si une librairie a seulement un exemplaire de votre livre, ou un disquaire un exemplaire de votre disque, le vol de cet exemplaire les font disparaître du champ d'achats possibles du client potentiel suivant. Et puisque le système de gestion de stock dit que l'exemplaire n'a pas été vendu, il se peut qu'il ne soient pas commandés à nouveau pour des semaines ou des mois, ou même à jamais.
J'ai souvent demandé à un libraire pourquoi il n'avait pas d'exemplaires d'un de mes livres, pour me faire dire, après une brève vérification dans l'inventaire : « Mais nous en avons. L'inventaire dit que nous avons encore un exemplaire en stock, et nous n'avons pas vendu depuis des mois, donc il n'y a pas de raison d'en recommander ». Il faut insister pour convaincre l'interlocuteur qu'il se peut que l'absence de vente soit due à l'absence dans les rayons.
Comme une copie en ligne n'est jamais épuisée, on a au moins l'occasion d'une vente, au lieu d'être soumis aux énormes efficacités et aux goulots d'étranglement arbitraires du système de distribution.
Leçon 5 : Les réseaux de partage de fichiers ne menacent pas les livres, la musique ou l'édition de films. Ils menacent les éditeurs existants.
Les industriels de la musique et du cinéma aiment suggérer que les réseaux de partage de fichiers vont détruire leurs industries.
Ceux qui développent cet argument se trompent radicalement sur la nature de l'activité d'édition. Editer n'est pas un rôle qui peut être détruit par une nouvelle technologie, quelle qu'elle soit, dans la mesure où son existence est rendue obligatoire par des considérations mathématiques. Des millions d'acheteurs et des millions de vendeurs ne peuvent pas se trouver sans un ou plusieurs intermédiaires qui segmentent le marché en segments plus gérables. En réalité, il y a en général une écologie très riche d'intermédiaires. Les éditeurs agrègent les auteurs pour les détaillants. Les détaillants agrègent les consommateurs pour les éditeurs. Les grossistes agrègent les petits éditeurs pour les détaillants et les petits détaillants pour les éditeurs. Les distributeurs spécialisés ouvrent de nouveaux chemins en développant des canaux de distribution particuliers.
Ceux d'entre nous qui ont observé le développement de la Toile comme nouveau média éditorial ont vu cette écologie évoluer en moins d'une décennie. Dans les premiers temps de la Toile, la rhétorique dominante affirmait que nous allions vers un âge de désintermédiation, que chacun(e) serait son propre éditeur. Mais en peu de temps, les propriétaires de sites se sont mis à payer des intervenants extérieurs pour qu'ils les aident à accroître leur visibilité sur Yahoo !, Google et d'autres moteurs de recherche (les équivalents de Barnes & Noble et Borders [6] pour la Toile), et les auteurs sur la Toile à contribuer avec enthousiasme à des sites comme AOL, MSN, ou sur le versant technologique, C-net, Slashdot, O'Reilly Network ou d'autres éditeurs. Pendant ce temps, des auteurs, de Matt Drudge à Dave Winner en passant par Cory Doctorow se faisaient connaître en publiant pour ce nouveau média.
Comme Jared Diamond l'a souligné dans son livre Guns, Germs and Steel, des contraintes mathématiques constituent l'arrière-fond du développement de toutes les organisations sociales complexes.
Il n'y a rien dans la technologie qui change la dynamique fondamentale par laquelle des millions de produits potentiellement fongibles parviennent à des consommateurs potentiels. Les moyens de l'agrégation et de la sélection peuvent changer avec les technologies, mais le besoin d'agrégation et de sélection est constant. L'usage par Google des recommandations implicites par les pairs dans l'ordre de présentation des résultats aux requêtes joue largement le même rôle que l'utilisation par les gros détaillants des statistiques détaillées de ventes pour sélectionner leur offre de ventes.
La question à laquelle nous sommes confrontés n'est pas de savoir si des technologies comme les réseaux pair à pair de partage de fichiers saperont le rôle des créateurs ou des éditeurs, mais celle de savoir comment les créateurs peuvent utiliser de nouvelles techniques pour accroître la visibilité de leurs œuvres. Pour les éditeurs, la question est de savoir s'ils vont comprendre comment jouer leur rôle dans le nouveau média avant que quelqu'un d'autre ne le comprenne. L'édition est une niche écologique : de nouveaux éditeurs se précipiteront pour la remplir si les vieux y échouent.
En en revenant aux principes fondamentaux, on comprend que l'édition n'est pas qu'affaire d'agrégation physique d'un produit, mais requiert une agrégation intangible et la gestion de la réputation. Les gens utilisent Google ou Yahoo !, Barnes & Noble ou Borders, HMV ou MediaPlay, parce qu'ils croient qu'ils y trouveront ce qu'ils cherchent. Et ils s'adressent à des éditeurs spécifiques comme Knopf ou O'Reilly, parce que nous avons construit la confiance dans notre capacité à trouver des sujets intéressants et des auteurs doués.
Maintenant, venons-en au partage de fichiers musicaux. Comment les gens trouvent-ils sur Kazaa ou sur n'importe lequel des services de partage de fichiers post-Napster ? Tout d'abord, il se peut qu'ils recherchent un morceau qu'ils connaissent déjà. Mais ces recherches d'un morceau ou d'un artiste déjà connu sont fondamentalement limitées, puisqu'elles reposent sur le marketing d'un espace de noms (artiste/morceau) qui est extérieur au service de partage de fichiers. Pour supplanter vraiment le système existant de distribution de la musique, tout système de substitution doit développer ses propres mécanismes de marketing et de recommandation de nouveaux titres musicaux.
Et de fait, on voit déjà de tels mécanismes émerger. Les réseaux de partage de fichiers dépendent fortement de la plus efficace des techniques de marketing : le bouche à oreille. Le temps passant, tous ceux qui ont étudié l'évolution de précédents médias verront que les recherches reposant sur une connaissance préexistante ou sur le bouche à oreille sont seulement les solutions de facilité pour le développement des nouveaux systèmes. Avec la maturation du marché, le marketing payant se développera, et étape par étape, nous développerons la même riche écologie d'intermédiaires qui caractérisent les marchés de médias existants.
Les nouveaux médias n'ont pas remplacé historiquement ceux qui leurs préexistaient, mais ont plutôt étendu les marchés, au moins à court terme. Il y a des occasions d'arbitrages renouvelés entre le nouveau média de distribution et l'ancien, et par exemple, la montée en puissance des réseaux de partage de fichiers a nourri l'échange de vinyles et CD (non disponibles par les canaux commerciaux classiques) sur eBay.
Dans le futur, il se peut que les services d'édition musicale en ligne remplacent les CD et d'autres médias de distribution physique, tout comme la musique enregistrée a relégué les éditeurs de partitions dans un marché de niche, et, pour beaucoup, ont transformé le piano domestique en un emblème nostalgique bien éloigné du centre familial d'accès à la musique qu'il constituait autrefois. Mais le rôle des artistes et des éditeurs musicaux ne disparaîtra pas. La question n'est pas alors celle de la mort de l'édition de livres, de l'édition musicale ou de la production de films, mais plutôt celle de savoir qui seront les éditeurs.
Leçon 6 : Ce qui est gratuit finit par être remplacé par un service payant de meilleure qualité
Une question à mes lecteurs : combien d'entre vous reçoivent-ils toujours leurs courriels à travers des connexions téléphoniques pair à pair par UUCP, ou le vieil Internet « gratuit », et combien payent 19,95$ ou plus à un fournisseur de services ? Combien d'entre vous regardent-ils la télévision « gratuite » et combien payent de 20 à 60$ pour le câble ou la télévision par satellite ? (et ne parlons même pas de louer des cassettes ou DVD de films par rapport à acheter des copies physiques de vos films préférés)
Des services comme Kazaa fleurissent en l'absence d'alternatives concurrentielles. Je prédis avec confiance qu'une fois que l'industrie musicale offrira un service qui donne accès à un ensemble similaire de morceaux, qui s'abstient de mettre en œuvre un onéreux système de protection anti-copie, qui inclut des métadonnées plus exactes et d'autres formes de valeur ajoutée, il y aura des centaines de millions d'abonnés payants. Ceci, bien sûr, s'ils évitent d'attendre trop longtemps, auquel cas Kazaa lui-même commencera à offrir ces avantages dans un service payant. (Ou le ferait en l'absence d'obstacles juridiques). Tout comme AOL, MSN, Yahoo !, C-net et bien d'autres ont construit collectivement un secteur de nouveaux médias qui représente des milliards de dollars à partir du Web « gratuit », les « éditeurs » bâtiront sur les réseaux de partage de fichiers.
Pourquoi est-ce que vous paieriez un morceau que vous pourriez avoir gratuitement ? Pour la même raison que vous achèterez un livre que vous pourriez emprunter dans une bibliothèque publique, ou achèterez un film sur DVD que vous pourriez regarder à la télévision ou louer pour le week-end. Parce que ce sera pratique, facile à utiliser, à cause du choix, de la facilité de sélection, et pour les enthousiastes à cause du simple plaisir de posséder quelque chose auquel vous tenez.
Le service rendu à l'heure actuel par les systèmes de partage de fichiers est au mieux médiocre. Des étudiants et d'autres personnes disposant de temps libre le trouve adéquat. Mais il laisse beaucoup à désirer : copies redondantes de qualité médiocre, disponibilité intermittente de certaines œuvres, identification incorrecte de l'artiste ou du morceau, et bien d'autres défauts.
Des contradicteurs pourront affirmer que la Toile démontre précisément ce dont ils ont peur, que le contenu sur la Toile est « gratuit », que la publicité est un modèle commercial insuffisant pour les fournisseurs de contenus, et que les modèles d'abonnement ont échoué. Cependant, j'affirme que nous n'avons pas vu la fin de l'histoire.
Les sites sur abonnement connaissent une croissance. Les professionnels de l'informatique peuvent être vus comme des pionniers sur ce marché. Par exemple, O'Reilly's Safari Books Online connaît une croissance de 30% par mois, et représente maintenant une source de revenu représentant plusieurs millions de dollars pour nous et d'autres éditeurs.
La plupart des observateurs semblent aussi ne pas remarquer que l'Internet est déjà vendu lui-même sur abonnement. Ce sur quoi nous travaillons est le développement de services à valeur ajoutée de qualité. Qui plus est, il y a déjà des fournisseurs de services intégrés verticalement (en particulier AOL Time Warner) qui fournissent une connectivité de base mais possèdent de vastes bibliothèques de contenu attractif.
Lorsqu'on considère les services de contenu en ligne sur abonnement, les analogies avec la télévision sont instructives. La télévision gratuite financée par la publicité a été largement supplantée - ou plutôt complétée - par les abonnements au câble. Qui plus est, le chiffre d'affaires des services de base du câble a lui-même été complété par diverses agrégations de chaînes à valeur ajoutée ; HBO, l'une de ces chaînes, est maintenant la plus rentable de la télévision. Et pendant ce temps, sur l'Internet, les gens payent à leur fournisseur de services 19,95$ par mois pour l'équivalent du service de base du câble, et une occasion idéale de construire un service à valeur ajoutée, à savoir un service de téléchargement de musique est ignorée du fait du manque de vision de l'industrie musicale existante.
Une autre leçon de la télévision est que les gens préfèrent les abonnements au pay-per-view, sauf pour quelques événements très spéciaux. Qui plus est, ils préfèrent les abonnements à de grands « bouquets » de chaînes plutôt qu'à des chaînes individuelles. Ce qui fait que les gens s'abonnent au « bouquet » cinéma au « bouquet » sports, etc. Les ballons d'essai de paiement au morceau lancés par l'industrie phonographique marcheront peut-être, mais je prédis qu'à long terme, des abonnements illimités mensuels, peut-être segmentés par genre musical domineront.
Leçon 7 : Il y a plusieurs façons d'y arriver
L'étude d'autres marchés de médias montre cependant qu'il n'y a pas de solution magique unique. Une compagnie intelligente maximise ses revenus sur toutes ses lignes de revenus, se rendant compte que les vraies occasions s'ouvrent lorsqu'elle fournit les meilleurs services aux clients qui au bout du compte paient ses factures.
Chez O'Reilly, nous avons conduit des expériences de distribution en ligne de nos livres depuis des années. Nous savons que nous devons offrir une alternative en ligne convaincante avant que quelqu'un d'autre ne le fasse. Comme le dit un proverbe Hawaïen, « personne ne nous a promis demain ». La mise en concurrence avec des offres alternatives gratuites nous force à explorer de nouveaux médias de distribution et de nouvelles formes d'édition.
En addition au service sur abonnement Safari mentionné plus haut, nous publions un vaste réseau de sites « gratuits » financés par la publicité dans l'O'Reilly Network. Nous avons publié un certain nombre de livres sous des licences de publication ouverte, où la redistribution libre et gratuite [7] est explicitement autorisée. Nous le faisons pour plusieurs raisons : pour promouvoir des produits qui pourraient autrement être ignorés, pour construire la fidélité des membres de communautés en ligne, et parfois, parce qu'un produit ne peut plus être vendu économiquement dans les canaux traditionnels, et nous préférons le rendre disponible gratuitement plutôt que de le voir disparaître complètement du marché.
Nous publions aussi beaucoup de nos livres sur CD-ROM dans un format baptisé « bibliothèque sur CD », qui contient typiquement une demi-douzaine de livres sur un CD.
Et bien sûr nous continuons de publier des livres imprimés. L'existence de copies en lignes gratuites est parfois utilisée pour promouvoir un sujet ou un auteur (des livres comme La Cathédrale et le Bazaar ou The Cluetrain Manifesto devinrent des best-sellers en version papier suite à leur forte présence en ligne). Nous mettons en ligne des extraits significatifs de tous nos livres, de façon à ce que les lecteurs puissent avoir une idée de ce qu'ils contiennent. Nous avons même trouvé des moyens d'intégrer nos livres dans les systèmes d'aide en ligne pour des produits logiciels, y compris Dreamweaver et Microsoft Visual Studio.
Il est remarquable que certains de nos hybrides livre imprimé/livre en ligne qui ont eu le plus de succès utilisent des présentations de contenu différentes dans chaque contexte. Par exemple, une grand part du contenu de notre livre à succès Programming Perl (dont nous avons vendu plus de 600,000 exemplaires en version papier) est accessible en ligne comme documentation standard de Perl. Mais l'ensemble -sans parler des avantages d'un exemplaire papier, ou du plaisir esthétique d'une maquette à fort design de marque- n'est disponible qu'en version papier. Des façons diverses de présenter la même information et le même produit augmentent la dimension et la richesse du marché.
C'est la leçon finale. Donnez au wookie ce qu'il veut ! comme le disait Han Solo dans le premier Stars Wars. Donnez-lui d'autant de façons que vous pouvez en inventer, à un juste prix, et laissez-le choisir ce qui lui convient le mieux."
[1] NdT : Comme la plupart de ceux de cet article, ce chiffre fait référence au marché américain.
[2] NdT : Le nombre de disques édités par les éditeurs professionnels aux USA en 2001 était de 37,000. Ce nombre a chuté a 25,000 en 2002.
[3] NdT : dans « Un tramway nommé désir »
[4] NdT : On a évité de traduire ici copyright par « droits d'auteurs et droits voisins » pour éviter toute confusion par rapport à l'intention originale de l'auteur.
[5] Safari Books Online->safari.oreilly.com
[6] NdT : Principales chaînes de libraires aux Etats-Unis.
[7] NdT : Les licences utilisées sont la GNU FDL et l'Open Publication Licence (aujourd'hui fondue dans une licence Creative Commons). La reproduction en masse commerciale est sujette à autorisation dans ces licences.
Sandrinette
Messages postés4796Date d'inscriptionjeudi 17 octobre 2002StatutMembreDernière intervention27 mai 2008 5 nov. 2003 à 15:44
Je ne sais toujours pas cmt tu as déniché la traduction - je n'ai pas vraiment cherché à fond - mais au passage, voici un lien qui intéressera p-e certains : http://www.sopinspace.com/~aigrain/fr/
Fu Xuen
Messages postés3642Date d'inscriptionjeudi 24 avril 2003StatutContributeurDernière intervention11 septembre 2005305 9 nov. 2003 à 11:07
Merci, c'est effectivement très intéressant.
-= Fu Xuen =-
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lib
Messages postés27Date d'inscriptionlundi 3 novembre 2003StatutMembreDernière intervention 4 juillet 20062 9 nov. 2003 à 06:39
J'ai trouvé ça très intéressant car je me disait justement que d'utiliser kazaa ou napster (auparavant) était un peu comme prêter un livre à un copain, qui en achètera d,autres du même auteur, si je me suis pas trompée ;)
Chacun dit je t'aime Chacun tend les mains
Oublie tes problèmes Oublie pas les miens